La posture éducative: un outil humain et performant pour les entraineurs


Tous les jeunes qui pratique du sport en compétition vivent des moments « extrêmes » en terme d’émotions, il n’a qu’à se promener sur les bords des stades de compétition pour voir les enfants dans tous les états émotionnels: la peur du départ ou de s’engager, la colère d’avoir fait une erreur, la tristesse d’un résultat, la joie d’une victoire.Tous ces moments « extrêmes » sont connus de tous les entraineurs mais comment les accompagner pour qu’ils soient constructifs et pas l’inverse?C’est là que rentre en jeu la capacité d’accompagnement éducatif de l’entraineur qui aura des outils afin que les jeunes sportifs comprennent que les émotions sont normales mais qu’il faut les comprendre pour les réguler.Si ce travail n’est pas effectué, nous allons avoir de futurs athlètes de haut niveau avec des facteurs limitants dans ce domaine qui seront difficiles à transformer en force, c’est souvent pour cela que l’on fait appel de plus en plus à des préparateurs mentaux.Combien de jeunes athlètes arrivent sur des circuits internationaux (fis, coupe d’Europe et coupe du Monde) en étant peut être prêts sportivement mais d’une fragilité émotionnelle, d’un manque d’estime et de confiance en soi criant qui vont être extrêmement compliqué à modifier. Beaucoup d’entre eux n’ont pas les armes et la force pour gérer des pressions et des engagements nécessaires au haut niveau.Certains craquent et abandonnent leurs rêves et d’autres vont jusqu’à prendre des anti dépresseurs pour « tenir ».Il est urgent de remettre le sport à sa juste valeur.La posture éducative, bien connue des éducateurs spécialisés, est une attitude adaptable aux différentes situations auxquelles le professionnel aura à faire face tout en respectant une éthique qui sera toujours orientée vers la construction du jeune.L’entraineur, le plus souvent, pratique son accompagnement avec ce qu’il est, son expérience et son « bagage de vie » mais cela ne doit faire qu’une partie de son apport éducatif, il doit avoir appris et eu conscience de ce qu’est une posture et ce que cela comporte. Les entraineurs ont une tendance à avoir des certitudes dans leurs approches auprès des jeunes et remettent la faute sur ceux ci quand leur rapports se dégradent ou que les résultats attendus ne sont pas à la hauteur de leur exigence.Il n’y a pas de vérité ultime, il doit toujours y avoir un doute éthique.Le questionnement permet de revoir ses orientations, d’inventer  et de se renouveler sur notre relation au jeune sportif. Lorsque nous sommes face à des moments difficiles, des performances en baisse, des manques de motivation ou des progressions en berne, l’éducateur se doit d’être fiable pour garder une qualité de lien avec le sportif.Si l’encadrant n’est pas capable de s’interroger sur sa posture professionnelle, il y a résistance face aux évènements et cela génère des rigidités dans l’action et des jugements moraux dans l’évaluation, nous ne sommes plus dans l’accompagnement mais dans le jugement et cela n’est pas notre rôle.La relation entraineur/entrainé est fragile lorsque nous vivons des moments forts en émotions, l’entrainé les vit déjà avec intensité, si l’entraineur « en rajoute » l’ascenseur émotionnel est décuplé ce qui détériore la relation et la capacité de l’entrainé à gérer ses moments. Sur le long terme, ce manque de lucidité et de recul de l’entraineur face à l’entrainé crée une perte de confiance en soi. Avant de travailler auprès des jeunes, les éducateurs se doivent de travailler sur la régulation de leurs émotions, il en va de leur accompagnement.Une posture éducative inclue évidemment des compétences techniques que la formation en France nous donne avec succès mais elle inclue aussi des qualités relationnelles et cela est totalement exclu du système de formation des entraineurs. Il arrive trop souvent que l’on explique des manques de réussite uniquement par l’aspect technique mais il me semble que l’emblématique « skie sur le pied exterieur » arrive aux oreilles des jeunes depuis leur premiers pas sur les skis alors le problème pourrait être vu sous un autre angle. Ne serait il pas temps de mettre l’accent sur notre rapport relationnel pour pouvoir apporter la confiance, l’estime de soi, l’aspect bienveillance et écoute.Pour améliorer la qualité relationnelle, les entrainés doivent avoir confiance en leurs entraineurs, et cette confiance se gagne, elle n’est pas acquise. Pour cela il existe la règle des 3 C (Consistance, Contenance, Constance):La consistance est ce que l’entraineur a à apporter, c’est l’ensemble des expériences professionnelles et personnelles, heureuses et douloureuses, une somme de vécus assimilés et assumés transmises à l’autre. Quand un jeune voit son entraineur, il doit être certain qu’il peut compter sur lui, qu’il est là pour lui, qu’il peut compter sur ses compétences.La contenance peut être vu comme une sorte d’enveloppe dans laquelle le jeune sent qu’il est aidé, soutenue, encourager et écouté. Cette enveloppe doit être claire et résistante pour que le  jeune puisse être en confiance.La constance, c’est la capacité de l’entraineur à supporter les moments de vide, de stagnation. L’entraineur doit être stable, doué de calme et avoir une forte dose de prise de recul pour permettre à l’entrainé de voir en lui un pilier sur lequel il peut se soutenir quand il en a besoin et cela dans la durée, à l’épreuve des mois voir des années.La confiance en soi est nécessaire pour pouvoir s’engager pleinement dans son sport, gérer les hauts et les bas et continuer à avancer, l’entraineur a un rôle primordial dans la construction de cette confiance et cela reste possible si l’entrainé ressent cette confiance et une grande force de la part de son encadrant.La posture éducative est valable si elle repose sur un solide socle éthique.Ce socle éthique est la capacité de se poser des questions: jusqu’où puis je aller? De quel droit? Au nom de quelle valeur? A partir de quelles paroles?Connaissons nous assez nos jeunes pour savoir si nos paroles ne seront pas destructrices?L’éthique de l’éducateur n’est jamais linéaire, figée, elle pousse l’entraineur dans ses contradictions voir ses retranchements. Elle est une manière de confronter ses valeurs à la réalité.La recherche de la performance ne se résume pas à un aspect technique et physique, les jeunes sportifs doivent pouvoir compter sur leurs entraineurs pour être présent face aux émotions auxquels ils vont être confrontés durant leurs années de compétitions. L’accès au haut niveau et la capacité à y rester dépend de ce que nous allons apporter à ces jeunes.Il serait grand temps d’avoir une réelle réflexion sur cet apport de formation et de prise de conscience auprès de tous les encadrants sur l’impact énorme qu’ils ont sur nos sportifs et leur équilibre. Sans ce travail nous resterons des ignorants et nous compterons sur la chance et l’exception pour avoir des sportifs français au top niveau et regarderons arrêter de nombreux talents dépités et dégoûtés.

POLLIER Fabien